L’Oregon s’achève…
…Bienvenue en Californie nous est souhaitée. Seulement, route barrée, nous sommes déviés via une sorte de sas de poste frontière avec stop obligatoire…
… ?...
…Souriante, d’élégante présentation, presque chic si ce n’était son blouson fluo de sécurité, la femme m’adresse une belle phrase en anglais tout d’un seul mot. Il va sans dire que je ne comprends absolument rien à son discourt. Sans succès durant quelques instants, je finis par comprendre vaguement, réponds d’où nous venons puis à nouveau l’incompréhension. Pas seuls dans ce cas semble t il, la belle sort de sa guérite un cahier d’images dédié à sa mission. Elle souhaite savoir si nous transportons certains fruits et légumes bien précis et d’où proviennent ils ? Au fil des pages apparaissent citrons verts, pamplemousses, radis, goyaves, oranges, ail et que sais je encore. Ne pouvant honnêtement et par cohérence répondre par la négative à chaque articles, je confirme avoir quelques oranges et pamplemousses. Dés lors, l’élégante demande à voir, je l’invite à monter à bord et Françoise présente un pamplemousse et deux oranges se gardant bien de tout sortir, le risque de « kidnapping » étant imminent. Préoccupée, notre préposée tente de nous expliquer son problème. Durant dix minutes, impossible de savoir où elle veut en venir.
Nous tentons de lui remettre les fruits…
…mais non, ce n’est pas vraiment ça…
…pour autant, on y est presque…
… Bref instant de réflexion…
…et si…
… oui, si elle voulait qu’on les épluche ???
…ouai, gagné !!! Et nous voici à éplucher nos oranges et pamplemousses et lui remettre soigneusement l’intégralité des épluchures. Satisfaite, nous reprenons la route sourire aux lèvres. Le sérieux de l’opération nous paraît plutôt anecdotique, ces fruits achetés en Oregon, donc aux Etats Unis, présentent ils un risque quelconque pour la Californie ? Cet état ne se la « jouerait il pas » un peu ?
A noter, sur les images présentées apparaissaient également des fleurs en pots. Comme à l’accoutumé, au début du périple, passé la frontière, l’équipière avait pris soins de garnir la petite jardinière du bord d’un plant d’orchidée et d’un kalankoé. Coup de chance, seules les primevères de jardin auraient contrarié notre fonctionnaire. La jardinière est sauve !
Ciel bas, pluie intermittente, nous admettrons que le climat se fout des frontières des hommes et que la douceur de la Californie ne débute pas au poste de la belle dame. Mais nous y sommes, cela ne saurait donc tarder. Pour l’heure, notre route nous amène en moyenne montagne littorale. Sol spongieux, à nouveau arbres emmaillotés de mousse opulente et de lichens démesurés, nous voici dans un tel sous bois que faute de lumière du jour, la sensation de nuit tombée prédomine. Feux de croisement mouillés et éblouissement des véhicules d’en face nous font réduire notre vitesse à trente à l’heure. La route très étroite s’insinue entre dans une forêt de superbes séquoias géants. Les fûts de ces dinosaures d’un autre âge frôlent la carrosserie. Ces arbres souvent millénaires aux flèches lancées à parfois prés de cent mètres vers le ciel imposent respect et humilité. Classés monuments historiques, il va sans dire qu’il est exclu d’abattre de tels phénomènes hors normes aux seuls fins d’élargir une route.
A nouveau, il est difficile de trouver un stationnement satisfaisant pour la nuit qui s’avance. Enfin, nous quittons la forêt dense, un bourg de moyenne importance, d’emblée, un beau parking de ce qui semble être un modeste casino bordé de vergers et prairie...
…Stop, ce sera notre escale ce soir.
Calme, le parking est quasiment vide. On s’installe derrière la bâtisse style « chalet rondins ». A pied, nous faisons le tour du propriétaire, rien à signaler, l’endroit nous convient. A noter que la porte d’entrée entièrement opaque en bois massif fait plutôt club privé. Il pleut, il fait froid, repas et soirée télé DVD. L’œil de l’équipière décèle quelques mouvements de voitures proches de Franky. Une lucarne du bâtiment laisse apparaître de vagues spasmes de lumières tamisées multicolores assortis de quelques notes de musique douce. Plusieurs pick up se garent à nos cotés. Quelques timides plafonniers ne laissent pas d’équivoque au coté câlin des occupants. Françoise propose de s’écarter un peu. A demi endormi, je rechigne, mais, observant la neige à gros flocons, il est prudent d’aller se garer au fond du parking, là où aucun véhicule n’est sensé circuler. Au final, la nuit se passera très bien au coté de ce que l’équipière considère à tord ou à raison comme un club de rencontre !
Chaude soirée pour certains mais froid réveil pour nous, la neige abonde, les reliefs sont blancs, elle commence à tenir sur la chaussée et les chasses neige défilent. Indécis, nous prenons prudemment la route enneigée. Persuadés de ne pas insister si cela perdure. Perdant rapidement de l’altitude, les choses s’arrangent rapidement. La route littorale s’agrippe à la falaise. Un panorama est indiqué, petit arrêt grand spectacle. Le Pacifique toujours en folie furieuse franchit ilots rocheux et récifs pour s’abattre à nos pieds.
Mon attention est retenue à distance, je m’interroge ...
… Aux jumelles, aucun doute, ce sont bien les premières maisons en front de mer qui, falaise de teuf ravinée, s’effondrent inéluctablement dans l’océan en furie. L’une à complètement disparu, ses trois ou quatre voisines ont perdu moitié de leur bâti, les dernières s’accrochent. Bien triste spectacle que celui là.
Rivages de l’Océan Pacific L’Océan aura le dernier mot Une semaine de route ininterrompue sous la pluie, il est temps de poser un peu ses bottes. Bodega-Bay, large crique protégée du large, petit camping propret, connexion Wi fi performante, deux jours de pose sont bienvenues. Lessive, entretien du véhicule, quelques affaires à suivre par le Net, pas le temps de farnienter. Une éclaircie nous est accordée pour une belle balade à pieds à longer la lagune. Un modeste port abri protège quelques mélancoliques vieux rafiots, Une langue de vase est envahie de plusieurs bancs de centaines d’oiseaux de mer au plumage doré. Peu farouches, nous les observons un moment. Plus loin, un port de pêche actif est endormi ce week-end. Il semble qu’ici encore ce soit crabes, huitres et moules qui prédominent. Des moules géantes, prés de vingt centimètres, existent ici. Passé la digue, la marée basse autorise l’approche de quelques pêcheurs bottés et encapuchonnés. On dirait la Bretagne au nord de San Francisco !
Colonie de barges marbrées Les moules géantes de Bodega Bay