SOUS LES ETOILES DU MONDE
                                                  ou les voyages de Françoise et Jacky sur la planète bleue

 
 
Durant nos premiers tours de roues vers le nord, la neige restera discrète dans les montagnes en arrière d’Ushuaia. Petite étape d’une centaine de kilomètres pour le curieux camping de Tolvin.

  
                          Epave et vent glacial au bord du lac glaciaire

Lessive, courrier et divers étant restés en standby ces derniers temps, une mise à jour s’impose. C’est par un vent catabatique que nous allons passer deux jours dans ce camping atypique comme son patron qui recycle en déco tout ce qu’il trouve. Cette semaine il réalise la « sculpture » d’un avion biplan avec vieux fûts et fers à béton. Traîne de droite à gauche un capharnaüm inimaginable, des milliers d’objets insolites sont au sol ou cloués aux cabanes diverses et palissades. Une heure de balade le long du lac en tenue polaire nous met vite dans l’ambiance.  Pas de téléphone portable, pas d’internet sauf une connexion aléatoire au village à trois kilomètres qui nous vaudra une balade à pied sous les rafales, on ne s’attarde pas.
  

                                                                    Au curieux camping de Tolvin

Seconde étape pour Rio Grande ou un stationnement devant l’estuaire du fleuve nous assure un joli décor lors des mouvements de marées très importants dans cette région. Un couple d’argentins, pratiquant le camping-car nous accueille chaleureusement. Suite à la simple demande d’adresse pour trouver du gaz, il nous en offre une bonbonne sans en accepter le paiement. Le soir, nous nous déplaçons devant chez lui afin de nous brancher électrique, faire de l’eau et nous donner son code WIFI. Evidemment, vers dix-neuf heures, nous sommes conviés à un assado (barbecue) gargantuesque. Encore un événement hors du commun de cette culture « latinos ».  
                        
                                               Chez Raoul et Perla  
                       

               A nouveau, c’est cambuse et frigo vides que nous nous dirigeons vers la frontière chilienne. Ceux-ci se montrent un peu plus tatillons que la fois dernière. La jeune femme fort-aimable au demeurant confisquera ce que la maitresse de maison n’avait pu utiliser, un demi oignon, une tête d’ail et un citron. Presque avec grâce, elle demandera à visiter placards, armoires et rangements ainsi que tous les coffres extérieurs. Devant la difficulté de tout vérifier, un coup d’œil rapide lui suffira.

                                                                                                 Chili, dernière frontière                                                                               
Une petite heure de paperasse et Franky va grincer et tempêter durant une paire d’heures de ripio infâme. L’idée, faire étape à Onaisin village à la croisée des deux seules pistes qui traversent la région et ainsi, demain, partir à la découverte d’une des seules compagnies de manchots empereurs vivant hors Antarctique. Il nous faudra trouver « la Baya Inutile » proche de la « Baya désespérance ». C’est juste pour te situer l’ambiance ! A ladite croisée, un refuge vide, fatigué de s’agripper à ce désert hostile balayé par ces foutus cinquantièmes, quelques matelas crasseux, des vieux journaux bourrés entre les planches disjointes où siffle l’air glacial…
… Un camion passe, je demande ma route pour Onaisin…
…c’est ici Onaisin… 
… ??? …
…mais, il n’y a pas de maison ?
… non, non, mais c’est ici, c’est juste un arrêt de bus…
…arrête de bus… pour qui ?...
… dix minutes plus tard, le camion suivant…
…ne connait pas !...
…le GPS ?...
…il a encore beaucoup à apprendre sur la Terre de Feu ! …
…au feeling, il faut faire du sud. Ripio infernal, mais bientôt un vieux panonceau confirme la direction d’une réserve naturelle de manchots empereurs. Atteinte vers quinze heures, sans trouver Onaisin. Françoise, persuadée de nos quelques faiblesses de santé est un peu contrariée de devoir dormir ici au milieu de ce désert glacé hostile. Au loin…
…eh…oui, un homme… perché à rafistoler une ligne électrique…
…je m’approche, les chiens aussi…
… l’équipière reste en arrière !...
… Onaisin il ne connait pas trop non plus. Nous sommes à l’entrée d’une estancia qui parait bien endormie. Je demande si on peut rentrer et stationner pour la nuit. Impossible, les patrons sont absents. Nous poursuivrons un peu, des bâtissent se dessinent sur le proche horizon. Une entrée, une allée, quelques vallons, un pont de bois, des chevaux en liberté enfin quelques constructions et du matériel agricole. Peu de vie, je risque un œil furtif par une fenêtre sale. Il y a certainement du monde vu le « bordel » qui accompagne un quignon de pain, un verre moitié plein et quelques os dans ce qui ressemble à une table de cuisine. C’est l’antre d’un gaucho. En arrière, nous rencontrons une femme presque stricte, bottes cuir, jean serré, cheveux bientôt gris en chignon soigné. Le plus poliment possible, nous présentons notre requête, précisant que nous sommes autonomes et repartons demain matin…
…pas gagné, pas l’accueil spontané… faut voir…
…la grande dame presque austère doit téléphoner. Voix vigoureuse, discourt direct, sourire retenu, c’est OK puis elle vaquera à ses occupations. Installés, nous hésitons à revenir pour offrir un porte clé « tour Eiffel ». Elle acceptera, remerciera, toujours retenue, nous nous retirons poliment et la nuit sera paisible, le vallon étant peu exposé au vent.
 
                             Nuit paisible dans cette estancia patagonne

Le lendemain, retour à l’entrée de la réserve « Pingouïn Rey ».
Attention, pas une âme à des kilomètres juste trois contenaires comme bureau d’accueil.
Nous sommes seuls, mais il a fallu prendre rendez-vous par internet plusieurs jours avant, attendre l’éventuelle acceptation par e-mail tout en étant avisés que les conditions météo peuvent nous retenir ici pour une durée… indéterminée ! J’oubliais… prévoir un paiement cash uniquement…
…bon… ok… t’as compris, ces rares bestioles, ça se mérite.
Porte fermée, une fumée hésitante s’échappe de la cheminée rouillée…
…il y a du monde…
…clôture enfin entr’ouverte, on se présente, on paye (cher), en deux mots, on nous explique, tout en soulignant qu’une majorité de manchots ont migré à cette saison… Après, débrouille toi ! Heureusement, rien de compliqué, quelques balises le long d’un sentier puis plusieurs postes d’observations discrets…
…une belle colonie est encore présente à quelques mètres. Les fameux manchots empereurs se dandinent en arrière de la grève le long d’un petit cours d’eau. L’adrénaline est de mise, observer dans la nature cette espèce hors de l’Antarctique est événement exceptionnel. Leur couleur, leur grandeur, différent bien des manchots de Magellan observés précédemment. Une centaine d’animaux papotent, se refont une beauté et piaillent à volonté. Beaucoup de jeunes au pelage marron ordinaire se font nourrir et coucouner par papa et maman de retour d’une pêche facile, ici, pas de surpêche, les canaux secondaires des archipels de Patagonie chilienne restent vierges. Quelques pas plus avancés, quelques adultes rentrent, le gosier gonflé de poissons et petits calamars avec retard ou font la causette. Sur la grève, plus personne. En effet il en manque. Néanmoins, nous rentrons satisfait de cette énième découverte que nous n’imaginions jamais il y a quelques temps. Au retour, quelques gauchos tentent de diriger plusieurs centaines de moutons vers l’enclos destiné au chargement en bétaillère.  Certainement ceux de l’estancia où nous avons dormi.

 

 

  
                                      Les rares manchots empereur hors Antarctique
 
L’objectif suivant : Punta Arenas ville très septentrionale à l’extrême sud du chili où, pour dynamiser la région, une « zone franche » importante fût mise en place…
…quel intérêt… ?
…simplement, comme chacun sait (si tu as bien suivi !) notre chalenge était d’effectuer ce demi-tour du monde (pas comme tout le monde évidemment, dans la hauteur !) autrement dit, joindre en camping-car l’Alaska à la terre de Feu notamment Ushuaia. Défi réussi le 8 avril 2017 il nous reste un deuxième chalenge : revendre le véhicule.
  

                                                                Au pays des épaves
Il se trouve qu’à la frontière chilienne franchie dernièrement, l’homme au képi observant l’épitaphe « SE VENDE » nous a bien expliqué les erreurs à ne pas faire pour revendre un véhicule d’occasion étranger au Chili. Si ce pays est plus tolérant que tous ses voisins latinos, il n’en demeure pas moins qu’une procédure de vente doit se faire uniquement dans l’une des trois zones franches du pays. En effet, il nous est précisé que si un acquéreur chilien achetait hors zone franche tout irait bien jusqu’au jour où il se présenterait à la douane pour quitter le pays. Procédure non conforme, c’est risque de confiscation avec en prime une procédure « Interpol » envers son vendeur. Ces complications nous avaient déjà été signalées officieusement par des amis voyageurs confrontés antérieurement au problème. C’est notamment le cas de Marie et sa petite famille baroudeuse, auteur du site « les six en piste » qui nous a confirmé.
Dès lors, c’est Maximiliano professionnel sérieux en véhicules d’importation, pignon sur rue, bien introduit dans le milieu douanier, consulté par internet, qui s’accroche à notre offre. Rendez-vous est pris. Il va sans dire que son prix ne nous intéresse pas et réciproquement, le nôtre non plus !...
…faut négocier, sinon, l’échec est assuré…
La visite se passe sur une station-service, véhicule immobilisé par une malencontreuse courroie qui lâche lors de l’examen du moteur ! Maximiliano ne s’en offusque guère et poursuit son étude. Devant le coté exceptionnel de ce véhicule pour cette région, les bonnes intentions convergent et l’affaire se conclue verbalement sans tarder. Quelques menus détails se règlent, un deuxième acquéreur motivé se présente mais, parole est donnée, on le garde sous le coude au cas où…
Rendez-vous est pris chez le notaire, puis dans sa voiture, Maximiliano nous sort les liasses de billets verts ! En cours d’après-midi, nous voici à l’hôtel avec armes et bagages plus quatre colis à expédier en France. Pour nous, la revente du véhicule à l’issue de l’aventure c’est un second défit de gagné. Il va sans dire que dans nos têtes, ce n’était pas gagné d’avance.
    
                                  Punta Arénas et…                        …Adieu  Franky  
Une belle et longue histoire s’achève, cœur gros, (très gros !) mais à la fois léger, nous parcourons un peu Punta Arénas avant d’essayer de ne pas rentrer trop brutalement. C’est Santiago qui est visé puis Valparaiso. Seulement les infos régionales diffusent en boucles les images d’un tremblement de terre justement à Valparaiso. Nous resterons donc quelques jours dans la capitale. 
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