Fin de matinée, à une cinquantaine de Montevideo, nous entrons dans la ville d’Atlantida. Rien de particulier si ce n’est un voyant rouge et une alarme qui nous incite à stopper dans l’instant…
…grr…grr…
… Une route en terre à droite avec juste là, un large portail de belle propriété ouvert, le reflexe, éviter de bloquer la route en terre, entrer dans le domaine sans se poser de question, l’alarme se renforce et le moteur s’arrête.
Examen rapide, l’alternateur ne recharge plus et les batteries du moteur se sont vidées. Un jeu de câbles de démarrage m’autorise à coupler les batteries cellules et redémarrer le cheval. Françoise maintient le coffre entre-ouvert, tout en accompagnant le véhicule pendant que je progresse au pas dans la propriété. Deux jolies maisons, gazon gras, arbres rares quand apparait un large parking à camions, quoi de mieux pour l’heure ? Quelques employés vaquent, on se présente, le propriétaire, Fernando, entrepreneur de transport et travaux publics, comprend parfaitement notre situation. Il appelle un électricien automobile qui arrive rapidement pour confirmer l’absence de charge de l’alternateur (neuf d’un an !). Il est midi, il dit revenir après la soupe. Il oubliera, (nous sommes en Uruguay !) mais avisera notre hôte qu’il est débordé. C’est un mécanicien de l’entreprise qui déposera l’alternateur et le patron m’accompagne à l’atelier du spécialiste. Très occupé je disais, après une heure, testé, juste un petit composant, le régulateur, pose problème. Changé dans l’instant tout sera remis en ordre pour le soir. Le patron nous fait grâce de la main d’œuvre de son ouvrier, merci beaucoup, c’est ça aussi l’Amérique Latine.
J’ai oublié de dire. Dans la conversation, il nous présente son frère, Sergio, concessionnaire en machines agricoles qui serait intéressé par l’achat de Franky. Visite, essai routier, négociations, paiement cash ou par virement, tout est ok. Rendez-vous à prendre pour régler l’affaire chez le notaire. Mais…
… nous sommes vendredi et, comme au Brésil, c’est super grand week-end de carnaval jusqu’à mardi soir prochain. Stationnés dans un camping au bord de la Mar Del Plata, une longue période d’attente sans confirmation ni autre information va se passer. Dans nos têtes c’est un peu « l’embrouille », abandonner notre cher compagnon de route contre une valisette de dollars…
…oui, mais après ?...
…si, si on a déjà quelques idées…
…et puis, cette trop belle occasion inattendue ira-t-elle bien à terme ?
Prenons donc patience quelques jours.
C’est là que nous découvrons un message d’Alberto…
…Alberto ?…
…qui est ce ?...
Sexagénaire, moustache soignée, uruguayen retraité suisse, partage sa vie entre les deux pays et rencontré brièvement il y a quelques jours aux thermes de l’escale précédente. Il se propose de venir nous chercher pour un apéritif dans un vieux manoir local et nous faire découvrir un peu sa région. Agréable moment suivi d’un repas bien de chez nous dans un chouette restaurant français du secteur tenu par des perpignanais. Faut-il aller si loin pour croiser nos voisins ? On aime découvrir les coutumes et les gastronomies locales, mais un lapin chasseur suivi d’une tarte tatin cuisiné avec art c’est bien aussi. Alberto nous conduit ensuite dans sa jolie maison prendre le café et nous dévoiler son musée perso de Sherlock Holmes. Une maisonnette mitoyenne est entièrement dédiée à une incroyable collection d’objets aussi divers que variés chinés à travers le monde rappellent la mémoire de cet illustre personne. Ambiance « british » assurée ponctuée dans un angle par quelques vestiges du Titanic. Avant de rentrer, passage chez quelques amis d’Alberto, français expatriés pour X raisons.

Invitation chez Sherlock HolmesPassé ce foutu carnaval, mercredi, tombe l’e-mail de Sergio notre candidat acquéreur. Plus ou moins attendu il confirme que l’administration uruguayenne ne permet pas l’importation de véhicules étrangers d’occasion sauf à verser une taxe protectionniste de cent pour cent du prix du véhicule, qui plus est, c’est l’administration qui fixe la valeur taxable sans tenir compte du prix entendu !...
…Revenons sur terre…
…nous avons bien un autre candidat dans le secteur qui lui, prétend pouvoir passer outre les considérations de l’administration (corruption ???). Il paye cash mais, seul bémol il n’est pas très généreux. Pas décidés à arrêter notre rêve de voyage pour brader notre compagnon. Aussi contents que déçus, fleur au fusil, il est décidé de ne pas donner suite et tenter la Patagonie et plus encore si affinité.
Juste avant, petite invitation chez un collectionneur de voitures anciennes (les seules à plus de vingt ans et à caractère de collection qui peuvent être importées). Concessionnaire de poids lourds, un soir il nous emmène découvrir son trésor dans une aile discrète de son entreprise. Ce sont sous bâches une vingtaine de véhicules aussi rutilants que prestigieux américains ou européens, une véritable fortune qui somnole ici. Entre autres une Ford de 1917 en parfait état de fonctionnement, deux Mercedes hors normes dont j’ai oublié les types, plusieurs modèles US de la grande époque, style Mustang, Chevrolet Camaro, Mercury et autres Pontiac et plus modestement une superbe 404 et quelques Fiat peu courantes. Père et fils passionnés nous content leur histoire avant de nous raccompagner à bord. Encore un exemple de l’accueil reçu en Amérique Latine alors que nous demandions rien à personne, juste quelques mots échangés devant notre camping-car sur le parking.
Chez Fernando le collectionneur